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Ces mots, comme une constatation qu'il ne l'avait pas laissé simplement contre lui, qu'il sombrait loin de cette vulgaire hésitation. Mais il avait cessé de réfléchir, sombrant dans ce désir crépitant de goûter à la saveur de ce dernier au contact familier. Tout en ne demandant rien d'autre qu'à en savourer le sel à même sa langue, ses lippes qui s'abandonnaient à la conquête de ce corps livré à sa merci. Sincérité mordante. Je veux juste te toucher. Il ne répondit rien à sa remarque, ses iris croisant simplement les siens, avant de revenir s'égarer à même ce torse qu'il redessinait, qu'il apprivoisait, palpitant audacieux qui s'agitait simplement pour tout aveu déversé, accordé à ces milliers de secondes étouffées, firmament brisé, éclaté dans ce ciel qui les surplombait, prêt à les dévorer. « Gab, dit... » Juste un souffle qui l'indifféra, sa langue venant ramper sur cette chair frissonnante, palpitante, réagissant à la moindre esquisse. Ces doigts qui s'entremêlaient à ses cheveux, cette tension envieuse qui semblait s'épanouir entre ses cuisses, et pourtant, il s'égarait simplement à cette peau, la redessinant, l'esquissant, l'effleurant, l'affleurant simplement parfois, sans jamais avoir l'intention d'aller trop loin, s'emprisonnant de lui-même à cette parcelle de son être au parfum envoûtant. Il ne tarderait pas à y mettre un terme... à briser l'égarement de ses lippes affamées... « Tu veux pas, juste... t'allonger à côté de moi ? » ... paroles qui l'arrachèrent à ces secondes, le poussèrent enfin à rouler à ses côtés, le cœur affolé dans sa poitrine, le regard étourdi par la voute céleste. Peut-être... que le peintre ne souhaitait rien de plus que ces secondes, ces instants volés aux ténèbres, de cette brise glacée venant s'attarder sur leurs êtres, soulever quelques mèches volages. Il le sentit pourtant, venir se lover contre lui, rechercher sa chaleur alors même qu'il s'éloignait. « C'est pas que j'aime pas ce que tu me fait. » Sa main recherchait ce palpitant cavaleur, ce souffle saccadé qui retrouvait peu à peu sa torpeur habituelle, en s'insinuant sous le cuir abîmé qu'il portait. Celui qu'il lui faudrait remplacer à l'occasion, pour en chasser les vestiges d'une autre nuit. « C'est rien. » souffla-t-il en réponse à ces mots l'assassinant sans même le réaliser, ça ressemblait un peu trop à ce qu'il aurait pu sortir à une fille qu'il ne désirait pas réellement. « Mais... J'ai pas de préservatifs sur moi. » Aveu serpentant jusqu'à lui sous l'écho de ce rire noyé sous la nervosité, se dissimulant sous cette sombre cascade si douce, presque éclatante dans ces ténèbres vacillantes. Son cœur s'affola à ces paroles, parce que lui en avait, mais que cela ne se déversa pas de ses lippes silencieuses. Il n'avait eu pour unique désir que de se noyer sensiblement pour mieux renouer avec l'air frais de son existence, se passer de son contact, de sa fragrance, de cette innocence tellement troublante alors qu'elle se nimbait de cette lascivité, faisant naître une bouffée de stupre à sa mémoire réceptive. « Quinze minutes, t'avait dit. Je crois qu'elles se sont écoulées. Tu veux qu'on aille chez moi ? » La danse de son palpitant se fit plus sourde mais plus intense, comme si une tempête faisait rage sous sa chair, à l'intérieur de son être, appréciant sans doute un peu trop le contact de ses lèvres contre les siennes, sous une douceur dérangeante. « Je te raccompagne. »
{#}168{/#}, Pearl District. Fragile aveu en demi-teinte, dangereuse oraison des ténèbres envers ce qu'il était en train de se produire. Il n'avait pas réellement songé à ce qu'il se passerait ensuite, après que ses lèvres se soient attardées sur sa peau. Et à présent, sans réellement s'engager à pénétrer dans sa demeure, il avait affirmé le conduire jusque chez lui. Il s'était redressé, prenant appui maladroitement sur son bras blessé, geste qui lui arracha une grimace légère, mais surtout invisible sous la brume sombre et nocturne. Puis ils étaient redescendu, rejoignant la moto toujours aussi rose qu'un peu plus tôt. Étrangement, cela ne le dérangea pas autant qu'auparavant, tandis qu'il l'enfourchait, appréciant le contact de ce corps brûlant contre le sien lorsque le moteur se mit à vrombir, dragon de métal s'élançant dans les rues de Portland. Plus vite, tellement, zigzaguant, sinuant, adrénaline assassine. Le temps comme un sablier aux graines chutant sans précipitation, suspendant la gravité, faisant cesser la course de l'astre de feu qui finirait fatalement par réapparaître. Mais la nuit, dame nocturne, s'étirait encore dans le ciel lorsque moteur s'endormit d'un geste, que la béquille retenait la moto, et que le marchand de rêve descendait sur le trottoir, levant le nez en direction de la bâtisse familière. Frappement frénétique, pulsation erratique, il emboîta les pas de l'artiste, regard sombre, besoin maladif de le toucher. Sans doute était-ce la folie qui était venue l'étreindre à présent, celle qui le poussait à revenir s'égarer dans cet antre de luxure. Lentement, venant humer la fragrance de sa peau, il se pressa contre lui, laissant son corps épouser le sien tandis qu'il le laissait ouvrir la porte. D'un geste presque tendre, ses doigts chassèrent cette chevelure abandonnée pour permettre à ses lèvres de s'égarer contre sa gorge une seconde, peut-être même deux, avant de s'immobiliser. « Qu'est-ce que tu m'as fait ? » Sincérité troublée, aveu frelaté de ce désir brûlant qu'il ne tentait plus vraiment de combattre, alors que sa main venait retenir la sienne lorsqu'elle se leva en direction, sans doute, d'un interrupteur. « Laisse éteint. »
{@=69}Javier Valnero{/@} |